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Nous voilà enfin en Polynésie ! 5 ans que nous attendions cela avec impatience. Il s’en est passé du temps depuis ce fameux tour de Bretagne, où nous évoquions déjà ensemble les lagons, les requins et les motus perdus à l’autre bout du monde….
Nous nous sommes donnés 3 mois pour profiter au maximum de ce vaste terrain de jeu, avant de reprendre notre périple à travers le monde. Notre objectif est diviser ce voyage en trois étapes : Les Marquises, Les Tuamotu et les Iles de la Société, et de consacrer environ 1 mois à chacune d’entre elle.
Trois mois ça peut paraitre beaucoup, mais c’est au final très peu quand on regarde les distances à parcourir. Accrochez vos ceintures et embarquez avec nous pour un voyage de 1400 miles à travers la Polynésie Française !
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Et on commence tout de suite le voyage par notre première étape d’un mois aux Marquises, l’archipel le plus à l’est de la Polynésie. C’est un regroupement d’îles plutôt jeunes à l’échelle géologique. Ce qui se traduit par de hautes montages, un relief escarpé et peu ou pas de barrière corallienne.
Là bas nous comptons renouer un peu avec le vert après un mois au milieu de l’immensité bleue.
C’est parti !
- Hiva Oa -
C’est au matin de notre trentième jour de navigation à travers l’Océan Pacifique, le 4 Avril que les reliefs de l’ile de Hiva Oa se dessinent sur l’horizon. Quelle émotion voir la terre se rapprocher après tout ce temps où l’immensité bleu était notre seule paysage. Il nous faudra encore attendre plusieurs heures, qui paraitront des jours, pour atteindre la baie d’Atuona. En début d’après-midi notre ancre tombe enfin dans ce petit port abrité mais un peu rouleur, où un joli comité d’accueil nous attend depuis le début de journée ! Joanne et Perrine sont arrivés par avion il y a deux jours pour nous rejoindre sur le Scuba Libre. Seulement deux jours de retard sur une navigation de 30, on ne pouvait pas rêver mieux !


Il nous faudra tout de même quelques jours pour digérer cette arriver et nous réadapter à la vie de terrien. Nous retrouvons le plaisir de se dégourdir les jambes, le gout des fruits frais, et bien sûr nous ne nous faisons pas prier pour aller célébrer cette arriver aux bars et restos du coin ! On peut bien se faire plaisir après 30 jours d’économies.
L’escale à Hiva Oa sera courte car nous souhaitons filer vers Fatu Hiva qui nous attire un peu plus. Mais nous trouvons quand meme le temps de faire un tour de l’ile en voiture, et d’essayer la vague du coin dans la baie juste à côté du mouillage. Damien se rappellera de ce beach break assez chaotique car il repartira de l’escale avec 3 points de suture sur la lèvre et un méchant poc’ sur sa planche. Le xx Avril, après un gros avitaillement, nous levons l’ancre direction Fatu Hiva, notre deuxieme escale. Nous appareillons sans Guillaume et Perrine qui reste à terre pour visiter les environs.



- Fatu Hiva -
Nous mettrons une dizaine d’heure, d’une navigation tranquille au travers, pour rallier Fatu Hiva et le fameux mouillage de la Baie des Vierges. Par contre nous devrons attendre le matin pour profiter de ce paysage iconique des Marquises car il fait déjà sombre quand nous jetons l’ancre. Nous mettons une ligne à l’eau en arrivant « pour voir » et deux carangues mordent sans se faire prier. Celles-ci associés au petit thon pêché à la traine en chemin nous promettent de nous endormir avec le ventre bien plein !
Après une bonne nuit réparatrice, nous nous réveillons tous excités comme au matin de noel. Nous allons enfin découvrir ce paysage, que tant de voyageurs nous ont vanté. Le spectacle qui s’offre alors à nous est incroyable. Nous sommes au milieu d’une toute petite crique large de 100m à peine et surmontée d’énormes monolythes rocheux. Tout est vert autour de nous et nous pouvons meme apercevoir quelques chevres dans les pentes escarpés environantes. Au fond de la baie on peut apercevoir le petit port et le village qui commence derrière. Et en arriere plan se dessinent les plus hautes montagnes de Fatu Hiva. Une fois remis de nos émotions nous nous rendons aussi compte qu’il reigne dans cette baie une ambiance très amicale et bienveillante. La plupart des autres bateaux viennent de traverser le pacifique comme nous et semblent en manque de relation sociale ! Tout le monde discute et s’invite les uns chez les autres. Quand vient le moment de mettre la tete sous, nous sommes une fois de plus comblés par le lieu. Le tombant est magnifique et plein de vie. Pierre aura même la chance de vivre un moment privilégié avec deux raies manta.


Entre deux sessions dans l’eau nous allons a terre pour nous balader. Nous faisons la rencontre de Basile, un pur produit de Fatu Hiva : chasseur d cochon sauvage, tailleur de bois, agricultueur… et pecheur ! Quand il nous voit arriver sur le quai avec nos fusils de chasse sous-marine il vient tout de suite nous aborder. Dans ces endroits assez reculés les locaux n’ont pas toujours la chance d’avoir du bon matériel et doivent souvent faire avec les moyens du bord. Nous sympathisons et il nous propose de nous emmener le lendemain pecher avec lui de l’autre côté de l’ile. Nous vivrons lors de cette sortie un moment inoubliable. Basile et son cousin Jen-Luc nous emmene en bateau sur la cote au vent, completement vierge. Aucun acces possible par la terre. Les Marquisiens y viennent uniquement par bateau pour chasser ou recolter le bois qui servira à leurs sculptures. Sur le chemin nous sommes escotés par plusieurs banc de dauphins, et quand nous nous mettons à l’eau avec Basile nous sommes emerveillés par ce que nous decouvrons. Jamais nous n’avions vu une eau aussi poissonneuse. Des peroquets, chirurgiens, des vivaneau, des carangues, des nasons… Tous nagent en rangs serrés sous nos palmes. Encouragés par Basile et Jean-Luc qui esperent ramener de quoi nourrir leur village, nous enchainons les apnées et les prises s’accumulent dans la barque. C’est Jean-Luc qui reste à la barre. Il suffit de lui faire signe depuis la surface pour qu’il rapplique en vitesse et récupère le poisson. Apres 3 spots et 3h bonnes heures de peche, la cale est bien rempli et nous pouvons regagner le port d’Hananavave. Basile et Jean-Luc sont aux anges. Ce n’est pas souvent qu’ils ramènent 30kg de poissons au village ! A partir de maintenant ces deux là nous appelleront « Les Champions » ! Pour terminer la matinée, Basile nous invite chez lui pour déguster une partie de notre peche. Nous vivons un beau moment de partage avec notre hote et sa famille. Encore un joli souvenir à ramener en France !



- Passage de la Ligne -
Jeudi 13 avril
C’est le grand jour ! Il est 9h et les derniers dixièmes de minutes d’angles avant d’atteindre la latitude 0 défilent sur l’ordinateur de bord. 0°0.00 ! L’équateur est traversé! Nous sautons sur le pont en chantant et en s’embrassant ! Nous débouchons une fiole de Calvados précieusement conservée pour l’occasion et nous en buvons avidement une gorgée chacun. Nous n’oublions évidemment pas d’offrir quelques gouttes à Poséidon.
Il est temps maintenant d’adouber chacun des valeureux équipiers pour leur entrée dans ce nouvel hémisphère. Chacun endosse le costume de Poséidon à tour de rôle. Trident, couronne en carton, barbe en filet de pêche et collier de Lambis, tout y est ! Pour l’un ce sera, enchainement d’énigmes, pour un autre, bras de fer contre un monstre marin ou encore course de natation à l’arrière du voilier. On a de l’imagination sur le Scuba ! A midi tout le monde a obtenu son diplôme du passage de la ligne, traversée de l’équateur par 87°48,9553 W de longitude, bravo à nous ! Le repas sera gargantuesque pour l’occasion. Paté, miche de pain, saucisson, houmous et vin rouge, nous avions conservé précieusement ces victuailles pour l’occasion !







L’après-midi est plus calme après ce passage de la ligne haut en couleur ! Il est tout de même ponctué de vols de fou de Bassan et de nombreux autres oiseaux annonçant les Galapagos tout proche ! Un de ces oiseaux a même passé toute sa nuit sur la girouette, la cassant par la même occasion… Ce sera l’occasion pour Tristan de faire une petite visite de courtoisie en tête de mat pour réparer ça.

- Galapagós -
Vendredi 14 avril
Les Galapagos sont devant nous ! Le vent est revenu pour nous permettre de profiter pleinement de cette journée. Nous avons fait le choix de ne pas nous y arrêter car les frais pour y séjourner en voilier sont trop coûteux. Mais nous allons tout de même les traverser ! A l’aube, nous arrivons au large de l’île de San Cristobal, timing parfait ! Le festival commence ! Les tortues vertes défilent le long du bateau, nous en comptabiliserons une vingtaine à la fin de la journée !


Nous voyons des raies mobulas ainsi que des dorades coryphènes sauter hors de l’eau, quel spectacle ! Des thons se font poursuivre par des dauphins, la faune des Galapagos est exubérante ! L’île de Santa Maria se dessine ensuite. Nous hésitons à mouiller pour la nuit tellement l’île est belle. Elle est parsemée de jolis vallons et de sommets qui ne demande qu’à être grimpés. Le manque de terre ferme se fait un peu sentir ! Le vent est encore présent, on continue. Nous disons au revoir aux dernières terres avant les Marquises. La nuit sera compliquée. De gros éclairs zèbrent le ciel et nous barrent la route. Nous slalomons pour les éviter. Tristan épaule Guillaume pendant son quart. Voir des énormes éclairs illuminer le ciel n’est pas très rassurant. Nous élaborons des techniques en cas de foudre. Dans tous les cas, si nous nous en prenons un, il ne restera pas grand-chose du Scuba. Nous croisons les doigts et nous chronométrons les écarts entre les éclairs et le vacarme qui suit. Heureusement l’écart se creuse doucement. Nous hissons de nouveaux les voiles, puis le vent retombe. Finalement, Damien hissera une nouvelle fois le lendemain matin à 6h. Le pot-au-noir joue avec nos nerfs !
- Le train-train s'installe -
Les jours suivants, le vent revient et nous recommençons à faire des moyennes honorables (146 MN le Dimanche 16 Avril, ça faisait longtemps). Nous aurons comptabilisé 44 heures de moteur sur cette Transpac. Des phoques nous escortent vers les alizées à 200 miles des côtes des Galapagos, ce sont vraiment des pêcheurs endurants ! La nuit du Mardi 18 Avril, nous sommes encerclés de 23 navires de pêches battant pavillon chinois. Greenpeace ou Sea Shepherd seraient-ils intéressés par cette information ? Nous notons leur position GPS et veillons au grain pour ne pas en aborder.
Jeudi 19 avril
Nous fêtons la moitié de la Transpac, plus que 2000 miles jusqu’à Hiva Oa ! Nous aurons le droit à de bonnes baguettes sorties du four au petit matin par notre boulanger/cuisinier Damien !


Mercredi 26 avril
21ème jour de traversée, nous célébrons le soit disant « anniversaire » de Pierre (qui est né un 21), on s’occupe comme on peut au milieu du Pacifique ! Le vent manque, on démarre le moteur. Ce sera de courte durée car en soulevant sa couchette, Guillaume découvre que la batterie moteur bout et fume ! Nous stoppons net le moteur et nous attendons qu’elle refroidisse. Nous n’osons pas imaginer ce qui aurait pu se passer ! Nous ne nous laissons pas abattre, nous tangonons le génois seul en attendant du vent et nous célébrons l’anniversaire de notre cher Pierre avec la pêche d’un joli thon qui saura aussitôt transformé en sushi ! Et bien-sûr le tout arrosé d’une bonne bouteille de vin !
- Mode régate activé -
Vendredi 28 avril
Les trois quarts de la traversée sont passés. Il ne nous reste plus que 1000 miles devant l’étrave. Apparemment d’après le fichier météo, le vent va revenir en force. En effet, un énorme front nuageux arrivant du Sud-Est fonce vers nous. Nous prenons les paris, à quelle heure sera-t-il sur nous ? A 6h, nous passons en ciseaux jusqu’à la fin de la traversée. Le Scuba commence à rouler, génial !
Les jours suivants seront plus rouleurs, les activités des derniers jours sont rangées au placard et nous préférons barrer à tour de rôle car le pilote auto a du mal à bien surfer les vagues. C’est parti pour 2h de barre chaque jour. Podcast dans les oreilles et crème solaire sur le pif, le Scuba fuse vers les Marquises avec des moyennes à 150 miles.

Lundi 1er Mai
On en a gros ! Jour de grève ! Nous sommes le 26 ème jour et c’est le faux « anniversaire » de Guillaume qui sera célébré en ce jour de fête du travail ! Le voilier roule pas mal mais Guillaume se lance tout de même dans un flan coco pour son gâteau d’anniversaire. Au moment d’enfourner, un coup de gîte fait sortir le flan de son moule et transforme le plancher en patinoire sucrée saupoudrée de flocons de noix coco. Agréable odeur mais difficile à nettoyer. Guillaume repassera pour son gâteau.
Vendredi 5 Mai

Jour 29, dernier jour de Transpac, nous nous préparons pour retrouver la terre ferme. Nous nous lavons, rasons et nettoyons nos draps bien imbibés de sueur dû aux longs jours de pétole. Le capitaine apéro, Pierre, nous prépare un dernier apéro digne des grands jours : olives, pain, pâté, chorizo. Les cales du Scuba sont bien vides mais recèlent encore quelques surprises que Pierre réussit à nous dégotter !
Samedi 6 Mai
Bonjour la Polynésie ! La côte se dessine à l’aube. Que c’est magnifique de voir doucement s’approcher l’île d’Hiva Oa convoitée depuis 30 jours. Au fur et à mesure que nous approchons, les vallées et pics se dessinent. A 14h, nous entrons dans la baie de Taaoa et mouillons au port d’Atuona. Nous allons pouvoir enfin fouler la terre ferme, sentir les bonnes odeurs de cette végétation exubérante et surtout déguster les délicieux pamplemousses chinois dont on nous a tellement parlé !


- Bilan -
Nous aurons mis 30 jours et 6 heures pour parcourir 3900 miles nautiques. Après un début difficile et plutôt stressant pour tout le monde, nous avons su nous serrer les coudes pour repartir sur de bonnes bases. Finalement les 30 jours loin de la terre sont passés assez vite, malgré quelques moments un peu longs où là aussi nous avons su être là les uns pour les autres.
Au final, comme le défini si bien Pierre le Vendéen “La Transpacifique ce n’est jamais qu’un gros trajet La Roche-sur-Yon – Rennes : on se chauffe tranquil’ sur la 2×2 voies jusqu’à Montaigue. Ensuite c’est l’autoroute jusqu’au périph’ de Nantes on on se prend un bon gros stop. Et à la fin c’est les 100 bornes de 4 voies longues et chiantes jusqu’à Rennes où on a l’impression qu’on ne va jamais arriver…”
