Carnet de Bord – Marquises

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Nous voilà enfin en Polynésie ! 5 ans que nous attendions cela avec impatience. Il s’en est passé du temps depuis ce fameux tour de Bretagne, où nous évoquions déjà ensemble les lagons, les requins et les motus perdus à l’autre bout du monde….

Nous nous sommes donnés 3 mois pour profiter au maximum de ce vaste terrain de jeu, avant de reprendre notre périple à travers le monde. Notre objectif est de diviser ce voyage en trois étapes : Les Marquises, Les Tuamotu et les Iles de la Société, et de consacrer environ 1 mois à chacune d’entre elles.

Trois mois ça peut paraitre beaucoup, mais c’est au final très peu quand on regarde les distances à parcourir. Accrochez vos ceintures et embarquez avec nous pour un voyage de 1400 miles à travers la Polynésie Française !

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Et on commence tout de suite le voyage par notre première étape d’un mois aux Marquises, l’archipel le plus à l’est de la Polynésie. C’est un regroupement d’îles plutôt jeunes à l’échelle géologique. Ce qui se traduit par de hautes montagnes, un relief escarpé et peu ou pas de barrière corallienne.

Là bas, nous comptons renouer un peu avec le vert après un mois au milieu de l’immensité bleue.

 

C’est parti !

- Hiva Oa -

C’est au matin de notre trentième jour de navigation à travers l’Océan Pacifique, le 5 mai, que les reliefs de l’ile de Hiva Oa se dessinent sur l’horizon. Quelle émotion de voir la terre se rapprocher après tout ce temps où l’immensité bleu était notre seul paysage. Il nous faudra encore attendre plusieurs heures, qui paraitront des jours, pour atteindre la baie d’Atuona. En début d’après-midi, notre ancre tombe enfin dans ce petit port abrité, mais un peu rouleur, où un joli comité d’accueil nous attend depuis le début de journée ! Joanne et Perrine sont arrivées par avion il y a deux jours pour nous rejoindre sur le Scuba Libre. Seulement deux jours de retard sur une navigation de 30, on ne pouvait pas rêver mieux !

Il nous faudra tout de même quelques jours pour digérer cette arrivée et nous réadapter à la vie de terrien. Nous retrouvons le plaisir de se dégourdir les jambes, le gout des fruits frais, et bien sûr, nous ne nous faisons pas prier pour aller célébrer cette arrivée aux bars et restos du coin ! On peut bien se faire plaisir après 30 jours d’économies.

L’escale à Hiva Oa sera courte, car nous souhaitons filer vers Fatu Hiva qui nous attire un peu plus. Mais nous trouvons quand même le temps de faire un tour de l’ile en voiture, et d’essayer la vague du coin dans la baie juste à côté du mouillage. Damien se rappellera de ce beach break assez chaotique, puisqu’il repartira de l’escale avec 3 points de suture sur la lèvre et un méchant poc’ sur sa planche. Le 10 mai, après un gros avitaillement, nous levons l’ancre direction Fatu Hiva, notre deuxième escale. Nous appareillons sans Guillaume et Perrine qui reste à terre pour visiter les environs.

- Fatu Hiva -

Nous mettrons une dizaine d’heure, d’une navigation tranquille au travers, pour rallier Fatu Hiva et le fameux mouillage de la Baie des Vierges. Par contre nous devrons attendre le matin pour profiter de ce paysage iconique des Marquises car il fait déjà sombre quand nous jetons l’ancre. Nous mettons une ligne à l’eau en arrivant « pour voir » et deux carangues mordent sans se faire prier. Celles-ci associés au petit thon pêché à la traine en chemin nous promettent de nous endormir avec le ventre bien plein !

Après une bonne nuit réparatrice, nous nous réveillons tous excités comme au matin de Noël. Nous allons enfin découvrir ce paysage, que tant de voyageurs nous ont vanté. Le spectacle qui s’offre alors à nous est incroyable. Nous sommes au milieu d’une toute petite crique large de 100m à peine, et surmontée d’énormes monolythes rocheux. Tout est vert autour de nous et nous pouvons même apercevoir quelques chèvres dans les pentes escarpées environnantes. Au fond de la baie, on peut apercevoir le petit port et le village qui commence derrière. Et en arrière plan se dessinent les plus hautes montagnes de Fatu Hiva. Une fois remis de nos émotions, nous nous rendons aussi compte qu’il règne dans cette baie une ambiance très amicale et bienveillante. La plupart des autres bateaux viennent de traverser le pacifique comme nous et semblent en manque de relations sociales ! Tout le monde discute et s’invite les uns chez les autres.  Quand vient le moment de mettre la tête sous l’eau, nous sommes une fois de plus comblés par le lieu. Le tombant est magnifique et plein de vie. Pierre aura même la chance de vivre un moment privilégié avec deux raies manta.

Entre deux sessions dans l’eau nous allons a terre pour nous balader. Nous faisons la rencontre de Basile, un pur produit de Fatu Hiva : chasseur de  cochon sauvage, tailleur de bois, agricultueur… et pêcheur ! Quand il nous voit arrivé sur le quai avec nos fusils de chasse sous-marine, il vient tout de suite nous aborder. Dans ces endroits reculés, les locaux n’ont pas toujours la chance d’avoir du bon matériel et doivent souvent faire avec les moyens du bord. Nous sympathisons et il nous propose de nous emmener le lendemain pêcher avec lui de l’autre côté de l’ile. Nous vivrons lors de cette sortie un moment inoubliable. Basile et son cousin Jean-Luc (capitaine) nous emmènent en bateau sur la cote au vent, complètement vierge. Aucun accès possible par la terre. Les Marquisiens y viennent uniquement par bateau pour chasser ou récolter le bois qui servira à leurs sculptures. Sur le chemin nous sommes escortés par plusieurs bancs de dauphins, et quand nous nous mettons à l’eau avec Basile nous sommes émerveillés par ce que nous découvrons. Jamais nous n’avions vu une eau aussi poissonneuse. Des perroquets, des chirurgiens, des vivaneaux, des carangues, des nasons… Tous nagent en rangs serrés sous nos palmes. Encouragés par Basile et Jean-Luc qui espèrent ramener de quoi nourrir leur village, nous enchainons les apnées et les prises s’accumulent dans la barque. C’est Jean-Luc qui reste à la barre. Il suffit de lui faire signe depuis la surface pour qu’il rapplique en vitesse et récupère le poisson.  Après 3 spots et 3 bonnes heures de pêche, la cale est bien remplie et nous pouvons regagner le port d’Hanavave. Basile et Jean-Luc sont aux anges. Ce n’est pas souvent qu’ils ramènent 30kg de poissons au village ! A partir de maintenant ces deux là nous appelleront « Les Champions » ! Pour terminer la matinée, Basile nous invite chez lui pour déguster une partie de notre peche. Nous vivons un beau moment de partage avec notre hote et sa famille. Encore un joli souvenir à ramener en France !

La vie est douce dans la Baie des Vierges

Le soir même, alors que nous flânons dans le Scuba, éreintés par notre journée et repus par ce bon repas, des sons de cornes de brume nous font sortir du carré. Un voilier est à l’approche et nous hèle. Nous reconnaissons tout de suite la coque rouge et cette jolie tonture. Pas de doute, c’est Magtogoek ! Nos amis Québécois viennent d’achever leur transpacifique et atterrissent à 30 m de notre bateau, une aubaine ! Nous nous devons de leur faire un bel accueil après ces 34 jours de mer (une belle performance pour un cotre en acier soit dit en passant) ! Il y a 40 jours, nos deux bateaux se quittaient au Panama et maintenant, 8 000 km plus tard, ils flottent à nouveau côte à côte, dans la même baie.

La vie au mouillage d’Hanavave suit son cours au rythme Marquisien, si ce n’est que nous avons dorénavant deux nouveaux amis avec qui nous partageons les activités : baignade à la cascade, pêche, snorkeling, couché de soleil etc…

Basile nous propose de nous emmener à Omoa, le village abandonné de l’autre côté de l’ile. Selon lui, il faut compter deux petites heures de marche pour accéder à ces ruines, qui sont, à l’écouter, les restes du « dernier village cannibale » de l’ile ! Nous signons tout de suite et organisons une expédition pour le lendemain matin. En plus de Keven et Cynthia, Loïc et Ben, deux copains du mouillage se joignent à nous pour traverser l’ile. 

Nous débutons l’ascension au petit jour et nous engageons sur la route principale. Deux heures plus tard, nous sommes à peine rendus au début du sentier qui permet de traverser l’ile. La « petite randonnée » prend alors des airs de gros trek. Nous quittons la route principale et c’est parti pour trois bonnes heures de crapahutage entre bosquets, forets, falaises escarpées, plaines vallonnées. Nous empruntons en fait les chemins utilisés par les chasseurs de cochons sauvages. Basile mène le convoi, filant comme un cabri pendant que nous peinons à avancer sur ce terrain difficile ! Il nous faudra donc cinq grosses heures pour arriver à Omoa, mais cela en valait la peine tant les paysages rencontrés sur le chemin étaient majestueux, pour l’atmosphère mystique qui y règne ainsi que pour les ruines impressionnantes.  Après un bon pique-nique et une petite pause, nous levons le camp. Et c’est reparti pour cinq heures de marche dans l’autre sens. Nous arrivons au bateau la nuit tombée au bout de notre effort, mais heureux d’avoir eu la chance de découvrir l’ile et partager cette expérience avec notre ami Marquisien.

- Nuku Hiva -

Le lendemain, c’est le moment de partir. C’est avec un petit pincement au cœur que nous quittons Fatu Hiva et nos nouveaux amis. Il faut aussi dire au revoir aux copains de Magtogoek que nous retrouverons surement aux Iles de la Société. Nous levons donc l’ancre dans la matinée en direction de Hiva Oa d’abord, pour récupérer Perrine et Guillaume, puis de Nuku Hiva où nous poursuivons notre voyage. La navigation se passe bien, les alizés sont bien là et nous poussent tranquillement vers la baie de Taioha’e. 

Nous arrivons pile à l’heure pour l’anniversaire de Pierre ! En plus de sa traditionnelle pizza d’anniversaire, le chanceux aura le droit à une plongée exceptionnelle en cadeau. En effet, nous nous rendons sur le spot de la Sentinelle Est, à l’entrée de la baie, et réputé pour la présence de requins et de raies manta. À peine à l’eau, nous croisons le chemin d’un gros requin tigre. Viennent ensuite les raies manta qui se baladent par dizaines. Et enfin, clou du spectacle : le ballet des requins marteaux qui vont et viennent dans le courant au niveau de la pointe du spot. Nous arrivons à les approcher de très près. Le spectacle est impressionnant.

Nous quittons ensuite la baie de Taioha’e à la recherche de mouillages un peu plus isolés vers le nord. Nous vadrouillons donc pendant plusieurs jours entre la baie d’Anao et sa plage de carte postale, et celle de d’Hatihe’u avec son petit village. Une balade sympathique et tranquille qui nous permet de découvrir un peu plus cette ile. Avant de quitter définitivement les Marquises, il nous faut faire un dernier stop à Taioha’e afin d’avitailler en prévision de la navigation vers les Tuamotu qui durera cinq jours environ. 

Sur le chemin du retour, nous faisons une nouvelle rencontre incroyable ! Alors que nous longeons la côte, nous apercevons des jets d’eau non loin de nous. En nous approchant, nous nous rendons compte qu’il s’agit d’orques. Cette fois ce ne sont pas les orques méchant de Gibraltar, mais des orques gentils du Pacifique, donc pas de panique. Nous mettons rapidement le bateau en panne et nous mettons à l’eau un par un en nous tractant derrière le bateau. Les orques sont curieux et se rapprochent de nous. Nous, nous sommes apeurés de voir ces énormes bestioles agiter leurs mâchoires massives à quelques mètres à peine de nos jambes qui se baladent dans le sillage du Scuba. Nous ne trainons pas dans l’eau, mais l’expérience est malgré tout inoubliable ! 

Le dernier stop à Taioha’e est une formalité, et nous levons l’ancre au matin du 29 mai, en direction des Tuamotu. 
Au revoir les Marquises. Et merci pour toutes ces découvertes !

- BONUS -

Les aventures de Perrine et Guillaume

Hiva Oa

L’équipe Perrine et Guillaume restent sur Hiva Oa pour aller se balader tente sur le dos. Les fruits à profusions (pamplemousse chinois, mangue, banane, pomme cythère) et les terrains herbeux face à la mer font de cette île magnifique un vrai paradis pour bivouaquer et aller à la rencontre des Marquisiens vivant au fond des vallées. En alternant stop (super facile et génial pour admirer le paysage à l’arrière des pick-up) et marche, nous sommes passés dans des vallées portant les jolis noms de Hanaiapa, Puamau…

 

Pour atteindre celle d’Hanatekuua, nous avons marché quelques heures et découvert cette magnifique plage. Nous y avons rencontré Joseph et Christelle. Ils se construisent ici une petite maison pour cultiver le coprah (chair de coco pour en extraire de l’huile). Nous les avons aidés pendant quelques heures… Entre rassembler les cocos, les ouvrir et les mettre en sac de 20kg, nous avons vite compris la difficulté du métier !

 

Au fond de la vallée d’Hanapaaoa, nous avons découvert un hameau d’une soixantaine d’âme. Une école y est tout de même installée. La maîtresse nous a fait découvrir le jardin entretenu par les élèves et nous avons pu contribuer à financer leur projet de fin d’année en leur achetant des légumes et fruits pour notre repas du soir.

La tente plantée devant la mer, nous sommes allé admirer le coucher de soleil sur les hauteurs du village. Surprise, un tiki couronné perdu dans les fourrés ! Il reste apparemment beaucoup de tiki et marae (édifice de culte) englouti par la végétation qu’il reste à découvrir !

Nuku Hiva

L’équipe de joyeux baroudeurs Perrine et Guillaume s’en retourne avec leur sac sur le dos pour aller découvrir l’intérieur de Nuku Hiva. La première journée pluvieuse nous oblige à marcher pied nu pour éviter de glisser dans le chemin de boue nous emmenant au petit village de Hatiheu.

De retour à Taiohae après avoir traversé l’île en stop, nous assistons à un spectacle de danse marquisienne et polynésienne.  

Le haka marquisien y est superbement mise à l’honneur par le groupe Mana Haka. Leurs corps couverts de tatouages ainsi que leurs habits traditionnels nous prouvent que la culture marquisienne est toujours bien présente. Lors de cette soirée des enfants de 11 ans ont été sélectionné pour prononcer un discours en marquisien sur le thème de « la place de la culture marquisienne entre modernité et tradition ». Les enfants étaient d’une aisance remarquable et décrivaient (en marquisien) la complexité de grandir entre la mondialisation et la conservation de la culture de leur archipel (danse, chant, cuisine, habits, navigation). Pour terminer cette soirée, un groupe de danse cette fois-ci tahitien, venu de Tahiti, ont présenté leur spectacle. Sans bien comprendre pourquoi nous nous sommes retrouvés au milieu de la salle pour danser tous les deux entourés des danseurs! Coincés comme nous sommes, les mouvements de danse polynésienne furent chaotiques mais marquèrent quelques esprits, puisque deux ou trois jours après nous croisions encore des gens nous félicitant pour nos pas de danse !

Les deux jours suivant furent passés à arpenter les chemins de Nuku Hiva. A 800 mètres d’altitude, au milieu de l’île, un vaste plateau couvert de pins et de fougères à des allures de Jurassic Park ! Des chevaux ainsi que des vaches se baladent en semi-liberté. L’air y est aussi plus frais ! Les vues surplombant les baies sont superbes ! Nous découvrons les pics basaltiques de Hatiheu ainsi que les baies de Anaho et Haatuatua. La vue sur la profonde vallée de Hakaui vaut également le détour ! Se balader dans ces décors si luxuriants en plein milieu du Pacifique est assez déconcertant, surtout après avoir passé un mois à ne voir que du bleu !

 

Après ces merveilleuses digressions terrestres, il est temps de retrouver notre fière Scuba Libre et nous commençons à préparer l’avitaillement pour notre traversée vers les Tuamotu. Mais avant de partir, un ami marquisien de Guillaume, Teiki, nous invite à célébrer son anniversaire, une soirée haute en chansons !

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